Chaque début d’année les blogueurs ont tendance à donner des prévisions portant sur leur secteur d’activité. Cet exercice, en plus du côté amusant de savoir si l’on va tomber juste, permet de prendre du recul sur son domaine et d’identifier des sujets stratégiques à traiter dans sa ligne éditoriale.
Dans la mesure où cela pourra être, en bout de course, bénéfique aux lecteurs de DataLayer.expert je vais donc jouer le jeu moi aussi.
Une difficulté accrue en 2024 pour collecter de bonnes données analytics et marketing
Si vous vous intéressez à ces sujets vous savez certainement déjà que nous sommes dans cette situation paradoxale où les outils (les plates formes publicitaires comme Google Ads par exemple) n’ont jamais eu autant besoin de données pour bien travailler (car il sont de plus en plus basés sur des technologies d’intelligence artificielle) alors même que ces données n’ont jamais été aussi complexes à récupérer.
Cette difficulté vient essentiellement de deux facteurs qui vont être encore plus présents en 2024.
La réglementation liée à la collecte de données
Ce sujet n’est pas nouveau puisque depuis 2018 la RGPD impose aux propriétaires de sites d’obtenir le consentement des internautes avant l’utilisation de la majorité des solutions de tracking (analytics comme marketing) mais il se renforce au fil des années. Cette RGPD par exemple était tout d’abord très peu respectée avant qu’une menace financière viennent peser sur les éditeurs de sites.
Puis le même type de loi est apparu dans d’autres pays ; et même certains très libéraux comme les états unis. Et en 2024 le DMA (Digital Market Act) viendra s’ajouter à cette liste en ciblant directement les plates formes publicitaires les plus importantes comme Google, Bing et Meta par exemple. Cette loi leur impose d’adapter encore leur modèle de collecte pour garantir toujours plus de respect de la vie privé des internautes, ce qui se traduira par un risque de perte de données encore plus grand qu’aujourd’hui pour les utilisateurs de ces solutions.
Il ne fait pas de doutes que ces réglementations répondent à une attente réelle des internautes de pouvoir maitriser les données qu’ils partagent avec les éditeurs de sites ; simplement elles limitent à chaque fois la quantité d’information utilisable par ces éditeurs pour pouvoir travailler (analyser les performances de son site, lancer des campagnes de marketing digital, etc…).
Le contexte technologique et notamment la fin des cookies tiers
En parallèle de ces contraintes juridiques des sujets purement techniques menacent eux aussi la récupération de ces données. En effet la majorité des solutions utilisent aujourd’hui du JavaScript et des Cookies pour transmettre les données du site web ou de l’application à mesurer vers leurs serveurs. Or ces deux technologies, bien que très pratiques et fonctionnelles, sont loin de garantir leur fonctionnement dans 100% des cas.
Sans parler des cas assez rares de navigateurs où le javascript serait totalement désactivé, les bloqueurs de publicité (qui sont utilisés par un grand nombre d’internautes) par exemple peuvent aller au delà de leur mission initiale et bloquer des JavaScripts d’outils analytics alors même que le visiteur aura donné son accord pour ce type de suivi. Dans ces situations, bien que la contrainte légale ait été passée, une contrainte technique vient amputer encore les données disponibles pour les analyses.
Et en 2024 c’est du côté des cookies tiers que cette problématique sera la plus présente. En effet si certains navigateurs comme Safari et Firefox les limitaient déjà c’est au tour du leader du marché, Google Chrome, de bouger. Progressivement à partir de ce mois de Janvier 2024 Google Chrome va abandonner l’utilisation de ce type de cookies pour ses utilisateurs (le pourcentage d’utilisateurs concernés va augmenter régulièrement au fil de l’année). Et dans la mesure où les outils marketing et analytics sont encore fortement dépendant de ce type de cookies, la quantité de données disponibles va s’en trouver fortement affectée.
La nécessité pour les éditeurs de faire évoluer en 2024 leurs solutions de tracking pour continuer à bien travailler
Si le contexte se complexifie les propriétaires de sites web vont devoir s’adapter en conséquence pour essayer de limiter la perte et de maximiser la qualité des données qu’ils collectent afin de pouvoir opérer au mieux leurs activités. Pour cela 3 sujets vont certainement devenir centraux en 2024.
La mise en place massive du Consent Mode de Google en 2024
Entre les utilisateurs de Google Analytics et ceux de Google Ads, le taux d’utilisation de Google chez les éditeurs de sites est extrêmement élevé et souvent central dans la réussite de leur activité. Or dès ce mois de Mars 2024, du fait du DMA évoqué plus haut, il ne sera plus possible d’utiliser pleinement ses solutions (notamment les fonctionnalités liées aux audiences) sans changer la configuration des tags Google. Leur technique nommée Consent Mode va ainsi devenir une norme quasiment indispensable très rapidement.
Nous entrerons dans le détail technique de cette mise en place dans un autre article mais en contrepartie du travail que cela va demander le bénéfice pour les éditeurs sera de pouvoir disposer, dans les outils Google, de données extrapolées (plutôt qu’aucune donnée) pour les visiteurs qui ne souhaitent pas être suivis ce qui est une vraie plus value pour les campagnes marketing et les analyses de performances.
Le besoin de retraiter et d’enrichir les données pour les rendre utiles
Le Consent Mode évoqué au dessus consiste pour Google à retravailler les données qu’il reçoit afin d’essayer de combler le vide des personnes ayant refusé le tracking. Cette démarche va devoir se généraliser en 2024 bien au delà de ce que peut faire Google de son côté.
Si vous êtes un éditeur de site web utilisant une solution de web analytics (ce que vous devriez faire si vous ne le faites pas déjà) il y a fort à parier que cette solution vous serve essentiellement à 2 choses : comprendre le comportement des visiteurs sur votre site pour l’améliorer et comprendre les performances de vos campagnes marketing pour mieux orienter vos efforts.
Pour le premier sujet (comprendre le comportement des visiteurs) la perte de données attendues en 2024 n’est pas catastrophique. En effet le comportement des utilisateurs mesurables restants peut constituer une base statistique suffisante à une compréhension de l’ensemble et vous pourrez donc continuer de travailler dans votre outils d’analytics pour ça.
Mais pour le second sujet (mesurer les performances de cos campagnes marketing) si la quantité de données collecté par votre outil analytics baisse, les calculs de retours sur investissement sont du même coup faussés. Il va donc devenir quasiment indispensable pour ce travail d’extraire les données de l’outils analytics pour les croiser avec d’autres (comme des données back office par exemple) afin d’extrapoler les données manquantes (un peu comme le fait Google avec le consent mode) avant de procéder à des calculs de ROI.
Pour ceux qui ont le plus de budget des solutions payantes se sont déjà montées afin de proposer ce type de services d’analyses. Et pour les autres nous verrons dans d’autres posts comment procéder à ce type de traitements avec les outils déjà à votre disposition.
La démocratisation en 2024 du tracking Server Side
Si vous n’en avez encore jamais entendu parler le tracking Server Side fait référence à des solutions de tracking qui cherchent à s’affranchir des problématiques techniques (JavaScript et des Cookies tiers) des trackings actuels.
Je rentrerai également dans le détail de ces solutions dans d’autres articles mais elles constitues une vraie plus value face aux contraintes grandissantes de 2024. Déjà en 2023 les sites ayant le budget suffisant ont commencé à mettre ce type de tracking en place ; mais pour l’instant seuls les plus gros sites ont pu le faire car cela demande d’une part un travail technique (et donc du budget associé) et d’autre par un hébergement spécifique pour le container Server Side, qui représente donc une charge supplémentaire pour les éditeurs.
Pour autant il y a fort à parier que cette charge d’hébergement va devenir de plus en plus accessible en 2024 (des offres attractives ont déjà commencé à se monter) ce qui permettra, même à des sites moins importants, d’envisager la mise en place de ce type de tracking très bénéfique.
Pour finir sur une notre positive je dirais donc que même si le contexte rend les choses plus compliquées pour les éditeurs de sites et les marketeurs, 2024 sera une année d’opportunités pour mettre en place de nouvelles solutions permettant de contrebalancer cette complexité dans le respect des choix des visiteurs en terme de protection des données personnelles. Et je ferais au mieux pour traiter de ces solutions et de leur mise en place dans les futurs articles de ce blog.